Dans le forum de notre article consacré aux déboires du site France.fr, notre @sinaute Hurluberlu fait un parallèle troublant entre le site français et son homologue italien, Italia.it.
"La fabuleuse aventure d'italia.it : un modèle à suivre pour france.fr?
L'échec du lancement de ce portail "france.fr" me rappelle la gigantesque catastrophe industrielle que fut le lancement d'un portail aux mêmes finalités dans un pays frontalier: l'Italie. Je parle là du site désastreux italia.it, et vue la proximité des noms de domaine comme des prérequis de chaque projet, la comparaison entre les deux aventures pour le moins hasardeuses me paraît opportune.
Le lancement du projet
L'histoire est longue et commence lors du deuxième gouvernement Berlusconi (2001-2006). Un comité interministériel lance le 16 mars 2004 l'idée d'un portail italia.it qui servirait de vitrine touristique du pays à destination des Italiens et du reste du monde. Le projet est coordonné directement par la présidence du conseil des ministres, et présidé par le ministre pour l'innovation et les technologies, Lucio Stanca (fiche wikipedia [it]). La réalisation est confiée à Sviluppo Italia SpA, agence publique (et à l'époque véritable cauchemar burocratique) dépendant du ministère de l'économie (description sommaire de ce machin ici), et à une de ses filiales, Innovazione italia SpA. L'on accorde pour ce projet la somme de... 45 millions d'euros (!). Un appel d'offres public est lancé en février 2005, gagné par un consortium dirigé par IBM Italia, dont l'un des présidents fut justement Lucio Stanca, avant qu'il n'entrât en politique. Mais bon, le conflit d'intérêt n'est guère un problème dans un gouvernement dirigé par Berlusconi...
Entretemps, on ajoute 9 millions au projet, venant du ministère de l'environnement. Je passe sur les problèmes ultérieurs relevant d'une burocratie kafkaienne, mais disons que jusqu'au 22 février 2007, il n'y a toujours pas de site italia.it, mais plein de comités théodules et de problèmes administratifs. Et un coût final faramineux: 58,1 millions d'euros.[Source principale: ce blog, et surtout ce billet, pour ce paragraphe. Il existe aussi une version anglaise, non consultée]
Le lancement du site : fiasco.
Enfin, on arrive au 22 février 2007, nous sommes alors sous le deuxième gouvernement de Romano Prodi (2006-2008). Le portail italia.it est mis en ligne. Et il est tout de suite la risée du web et des blogs, pour ses bugs, ses erreurs et ses fautes innombrables.Tout d'abord le logo choisi, ressemblant à un gros cornichon, est jugé ni fait ni à faire, ce qui dans le pays du design est un crime monstrueux (exemple de critique ici [it], et quelques parodies). La programmation du site est jugée déjà dépassée (pas de CSS et une organisation déficiente), l'accessibilité est pourrie: en une demi-journée, un blogueur et programmeur réalise une page d'accueil bien plus fonctionnelle (visible ici) pour démontrer qu'avec moins de moyens, mais des simples compétences, on peut faire nettement mieux. Les contenus écrits regorgent de fautes, d'erreurs et d'omissions, les traductions idem (le site se veut multilingue). De plus, le projet initial prévoyait un formulaire de réservations de chambre d'hôtels, qui n'apparaît guère et dont la viabilité semblait dès le début fort douteuse. La protestation s'étend bien sûr, des tour-operators italiens, à quelques présidents de région en passant par les fédérations de consommateurs. Ajoutons à ce tableau désastreux une vidéo désopilante où le vice-président du conseil (également en charge du Tourisme) Francesco Rutelli (fiche wikipedia [fr])parle anglais comme une vache espagnole (visible ici) pour vanter les mérites du site et du pays.
Face au tollé et au scandale, après une communication désastreuse, une commission d'enquête et enfin un constat lucide d'échec, le site est enfin clos 18 janvier 2008, soit moins d'un an après son lancement.
La résurrection: magic italy.
Mais c'était sans compter sur la ténacité berlusconienne. Revenu au pouvoir après les élections anticipées de 2008, il ne tarde pas à relancer le projet: le ministre de l'administration publique et de l'innovation Renato Brunetta (fiche wikipedia [it]) et la ministre du Tourisme Michela Brambilla (fiche wikipedia [fr] de son parcours original) remettent 10 millions d'euros pour relancer le machin... Certes c'est moins cher, mais bon, c'est pas donné non plus. Le 16 juillet 2009, le site renaît de ses cendres. Dans le même temps, la communication sur le tourisme lance le logo et le slogan "magic italy", tout autant critiqué: le nom est déjà pris (là), le logo est passe partout et vieillot [exemple]. Berlusconi déclare d'ailleurs dans une émission télé qu'il est à l'origine du slogan et qu'il a contribué au logo (et du coup on comprend mieux pourquoi c'est si nul). Dernièrement, ce slogan est réapparu lors d'une campagne de pub télévisuelle lancée ce mois-ci par le ministère du Tourisme et destinée à inciter les italiens à visiter leur pays. La voix off n'est autre que celle de... Berlusconi (on peut voir la pub ici). "Se rendre disponible pour promouvoir son pays est un acte de grand amour. Tout le monde devrait agir ainsi" a d'ailleurs expliqué la ministre du tourisme dans une conférence de presse pour justifier le choix saugrenu d'une telle voix off. Et, évidemment, pour répondre à pareil chef-d'oeuvre de propagande institutionnelle, les parodies n'ont pas tardé à fleurir (une petite sélection sur cette page du Fatto Quotidiano). Théoriquement, cette campagne télévisuelle devrait être aussi diffusée sur les écrans étrangers (dont ceux français), mais on ne sait pas encore si la voix off sera tenue là aussi par Berlusconi
Et le site italia.it, alors? Encore aujourd'hui, il est régulièrement critiqué par les blogs pour ses dysfonctionnements (un blog entier y est consacré [it]). Et de fait on peut dire que les bugs ne manquent pas. Pour prendre un exemple qui pourrait intéresser les francophones, la version française de ce site qui se veut multilingue serait pleine de bourdes (d'après un récent billet de blog, écrit en italien). Et sans entrer dans les détails, je remarque rien qu'en jetant un coup d'oeil rapide sur la première page du site en français deux grosses fautes qui devraient être absentes d'un site qui se voudrait professionnel:
1 ."communautè", erreur d'accent (et sans doute mauvais choix du mot)
2. "découvre l'italie": l'usage de la deuxième personne du singulier est la règle de base dans la publicité en Italie. En France, néanmoins, le tutoiement n'est pas de mise en la matière, on lui préfère le vouvoiement (ex: "nous vous devons plus que la lumière" "à nous de vous faire préférer le train", etc.). Bref, on a là une traduction peu fine. Et encore, je ne suis pas entré dans les détails...
Et je ne parle même pas des fautes stratégiques dans l'organisation du site... Disons que la plus grossière est qu'il fait doublon avec le site de l'agence nationale italienne pour le tourisme, bien plus fonctionnel pour ce qui est de fournir des informations pratiques, et où la présence d'un autre logo "italia" semble nuire à la lisibilité du message...
Bref, l'aventure d'italia.it se poursuit... Toutefois, à ma connaissance (mais peut-être n'ai-je pas cherché assez), on ne connaît ni l'affluence du site, ni son impact sur l'information des touristes et sur le marché du tourisme en ligne. Vu ce que j'ai lu, je doute fort de son efficacité, mais je ne demande qu'à être démenti.
Quant à france.fr, espérons que ça coûtera moins."
Bene, anzi male ... adesso cos’avrà da dire la Task Force creata appositamente dalla Michela Brambilla per “tacciare” o “consigliare” o “istruire” chi non parla bene dell’Italia?
Come potrà giustificarsi?
Beh, forse raccontando che “domani” il portale è pronto, che tutto va secondo i piani prestabiliti e che le cause … ma già le sappiamo queste cosette.
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